
CLH: Quelle sonorité ou image sonore y a-t-il, l’ensemble SuperMusique ? Est-ce qu’il y a une signature sonore ?
Pierre-Yves: J’imagine que ça dépend du projet, mais il y a des éléments récurrents : les partitions graphiques, les grands ensembles, l’absence de structures harmoniques ou mélodiques classiques. Ce n’est pas toujours perceptible à l’écoute, mais ces éléments soutiennent la musique. Et il y a une énergie, un éventail sonore très large, un peu comme une marmite qui peut exploser à tout moment.
CLH: Est-ce que l’ensemble SuperMusique a une identité artistique spécifique ?
Pierre-Yves: Pour moi, SuperMusique, c’est une composition continue de Joane, Danielle et Diane depuis les débuts. C’est comme une longue variation dans le temps. L’esthétique vient d’une tradition des années 80, influencée par le minimalisme et les restrictions de matériel, mais il y a toujours cette tension énergétique prête à surgir.
CLH: Est-ce que SuperMusique est un collectif ?
Pierre-Yves: Non, c’est dirigé. Ce n’est pas un collectif horizontal. Même si ça a émergé contre les orchestres traditionnels, leur structure s’en inspire : un chef·fes, une direction claire.
CLH: Quel bruit est typique pour ta ville, Montréal ?
Pierre-Yves: Le son des avions qui passent en permanence au-dessus de mon quartier. Et aussi le chant du cardinal, que j’entends souvent dans ma cour.
CLH: Est-ce que la géographie ou la société de Montréal influencent la musique ?
Pierre-Yves: Oui. Montréal est très segmentée entre francophones et anglophones, et je pense que cette séparation se reflète dans la musique aussi. Il y a une volonté de protéger une identité, surtout linguistique.
CLH: Est-ce que l’activité de SuperMusique est importante pour la ville ?
Pierre-Yves: Oui. Si SuperMusique n’existait pas, Montréal ne serait pas ce qu’elle est. C’est un pilier de la musique contemporaine ici. Maintenant que Danielle pense à la relève, on voit à quel point c’est important et complexe à transmettre.
CLH: Le public de Montréal est-il différent ?
Pierre-Yves: Difficile à dire. Parfois les concerts sont pleins, parfois vides. Il faudrait peut-être repenser la manière d’attirer le public. C’est très variable.
CLH: Quel est le rapport entre la musique et la liberté pour toi ?
Pierre-Yves: La musique, c’est la liberté. Décider de faire un son, c’est déjà un acte de liberté. Je me sens le plus libre quand je joue, quand je peux être moi-même.
CLH: Et en improvisation ?
Pierre-Yves: J’ai mon vocabulaire, mes gestes. Ce qui change, c’est comment l’environnement et les autres me poussent à choisir quoi jouer. C’est cette énergie partagée qui rend les choses vivantes. Une fusion qui n’arrive pas toujours, mais quand ça arrive, c’est fort.
CLH: Si tu devais supprimer un des trois termes suivants : composition, improvisation, concept ?
Pierre-Yves: Composition. Chez SuperMusique, c’est plus des concepts — ouverts, modulables. La composition est plus rigide. Un concept laisse plus d’espace à l’improvisation.
CLH: Qu’est-ce qui rassemble ou divise les improvisateur·ices·trices ?
Pierre-Yves: Le silence et l’espace partagés, qui permettent de construire quelque chose ensemble. Ce qui divise, c’est quand chacun·e reste dans sa bulle, en parallèle, sans écoute ni interaction réelle.
CLH: Quel est ton son favori ?
Pierre-Yves: Le vent. Toutes sortes de vent. C’est simple, vivant, et il revient toujours.
CLH: Et une note spéciale pour toi ?
Pierre-Yves: Le ré. C’est la note centrale de mes instruments, très présente dans les harmoniques des instruments à cordes.
CLH: Un intervalle spécial ?
Pierre-Yves: La seconde, surtout la grande. J’aime ce flou possible, ce jeu avec la septième et la neuvième.